MM. Druey et Capolupo, vous êtes respectivement responsable et adjoint du
service Jeunes, qui s’occupe à l’office AI pour le canton de Vaud de
l’insertion et de la réinsertion des moins de 25 ans.
Alexandre Druey :Oui, ce service vient d’être créé et regroupe notre
structure ANDIAMO, IPJAD et la CIS. Cela va donner une cohérence tant à l’interne
qu’à l’externe.
Adriano Capolupo :
Ce service qui s'intitulait REA2 et qui était organisé autour de la réadaptation
des jeunes s’est maintenant restructuré et a trouvé ainsi sa nouvelle
appellation.
Vous étiez à la base du projet de la CIS au départ,
d’où est venue l’impulsion ?
Alexandre Druey :
A l'époque, soit avant 2016, nous avions fait le constat qu'il y avait de plus
en plus de situations de jeunes adultes déposant des demandes auprès de l’AI.
Beaucoup d’entre elles s’étaient complexifiées et sclérosées, laissant ces
jeunes sans solution pour leur formation et leur intégration sur le marché du
travail. Lorsque nous examinions leurs parcours, nous nous rendions compte que
nous aurions pu agir de manière anticipée. Certaines problématiques, par exemple
relatives à la santé, existaient déjà pendant la scolarité. Il fallait donc
trouver une solution pour y remédier.
Adriano Capolupo :
Au-delà d’un dispositif permettant d'identifier ces jeunes, il fallait pouvoir
mieux les orienter. Comme les services d’accompagnement postscolaire
travaillaient davantage en vase clos, c'était plus difficile. La CIS nous a
permis de nous coordonner avec l’ensemble des acteurs en contact avec cette
population dont la problématique scolaire met en péril la perspective d’une
insertion professionnelle.
Comment se passent les rencontres ?
Alexandre Druey :
Le maître mot est « tous autour de la table ». Deux semaines avant les
rencontres, les membres de la CIS reçoivent les informations des établissements
scolaires. Il faut relever que notre charte nous tient à la confidentialité et
nous engage à ne pas porter de jugement. Après la phase d’exposition de la
situation, nous poursuivons les échanges en vue de trouver une solution. Si cela
n’est pas possible, nous entreprenons des démarches supplémentaires afin
d’identifier la meilleure réponse pour le jeune, sa famille et l’établissement
scolaire.
Adriano Capolupo :
Lors de ces séances, il y a un engagement de tous. Nous essayons de trouver des
solutions, convaincus qu’elles existent. L’ambiance est excellente et très
constructive.
Alexandre Druey :
La présentation des situations dure en principe 15 minutes. Or, puisqu’en raison
de la pandémie nous menons ces réunions en téléconférence et qu’ainsi nous
nous épargnons des temps de déplacement, nous nous accordons 30 minutes pour
échanger sur chaque situation. Cela nous a permis de rendre le système plus
performant.
Quelle est la stratégie de base de la CIS, comment la décrire ?
Alexandre Druey :
Il y a deux éléments de base : détection et intervention. D’abord, il y a la
détection dans les établissements. Quant à l'intervention, elle consiste à
mettre en place des solutions en lien avec les différentes prestations des
partenaires de la CIS.
Adriano Capolupo :
Il s'agit véritablement d'une stratégie présentant un avantage pour tous les
partenaires. En priorité pour les jeunes et leur famille, puisqu'on leur amène
une solution au terme de la scolarité. C’est aussi un plus pour les écoles qui
ont dorénavant un moyen de répondre aux problématiques les plus complexes. Cette
détection sur le terrain présente une réelle plus-value pour les services qui
composent la CIS, car on tend vers un modèle où les situations sont identifiées
et correctement orientées.
Alexandre Druey :
Les écoles ne peuvent pas tout connaître des prestations de soutien
postscolaire. Toutefois, nous relevons leur enthousiasme et leur volonté de
chercher avec nous des solutions pérennes pour des élèves fragilisés et en
échec.
Nous avons vu ce qui fonctionnait bien: l'enthousiasme, la création de
solutions adéquates. Y a-t-il des points qui peuvent être améliorés ?
Adriano Capolupo :
L’enjeu serait que l’ensemble des écoles du canton participe. Tous les
établissements scolaires ont été informés, mais seuls certains annoncent
régulièrement des situations. Tous doivent pouvoir s'approprier le dispositif.
Alexandre Druey :
Oui, effectivement l'information a été donnée partout, mais il y a plus ou moins
d'annonces selon les collèges. Nous espérons que les ateliers d’information
prévus dans ces établissements permettront de mieux faire connaitre la CIS.
Adriano Capolupo :
Un autre point à améliorer est la présence de la CIS sur le Net, même s’il y a
déjà un lien sur le site de l’Etat de Vaud.
Comment se dessine l’avenir, quels développements voyez-vous?
Alexandre Druey :
Continuer à optimiser les prises en charge de la CIS. Le but principal reste de
proposer aux jeunes et aux écoles une « boîte à outils » afin de leur offrir des
solutions et de les amener à croire en leurs compétences et en leur avenir. Nous
devons aussi développer le partenariat avec le CHUV. L’ouverture à la scolarité
post obligatoire, qui est en train de se mettre en place, offre également des
perspectives passionnantes…
Adriano Capolupo :
Le but ultime est une configuration où plus aucun jeune en difficulté ne se
retrouve sans solution. S’il est fondamental de développer un accompagnement
postscolaire efficace, il est tout aussi important de lui assurer une
visibilité.
Alexandre Druey:
N'oublions pas que la CIS concerne une minorité d'élèves, mais qui demande
beaucoup d'attention et d'énergie dans les écoles. Il n'en reste pas moins que
ces jeunes méritent que la CIS leur consacre du temps. En effet, les actions
réalisées maintenant sont un investissement qui permet d’éviter que leur
situation ne se dégrade au point qu’ils soient amenés un jour à solliciter, par
exemple, les services sociaux.
Quel est le bilan après une année d’exercice?
Alexandre Druey :
Les échecs sont minimes et, si tout le monde adhère : les écoles, les parents,
les organisateurs de mesures et surtout les jeunes, ça fonctionne ! le fait que
l’AI
intervienne sous l’égide d’ANDIAMO facilite l’adhésion lorsqu’il s’agit d’y
faire appel. En effet, pour nos partenaires, les familles et surtout les jeunes,
il est plus facile de solliciter ANDIAMO, qui est un organisme d’insertion
professionnelle, plutôt que l’assurance-invalidité, qui peut être vue comme
stigmatisante.